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Laurent Saccomano, Président de l’URPS ML PACA, est convaincu de l’intérêt des CPTS pour les médecins libéraux.

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Le Dr Laurent Saccomano, médecin vasculaire, est Président de l’Union Régionale des Professionnels de Santé Médecins Libéraux PACA (URPS ML PACA). Lui-même investi dans une Communauté Professionnelle Territoriale de Santé (CPTS) des Alpes-Maritimes, il est convaincu du caractère incontournable des CPTS dans la prise en charge des patients. Ici, Laurent Saccomano nous livre sa vision de cette nouvelle forme d’exercice.

Comment définiriez-vous les CPTS ?

Une CPTS est le regroupement des professionnels de santé, et dans l’absolu de tous les professionnels de santé, d’un territoire au sein d’une communauté. Son intérêt est d’élaborer un projet de santé adapté à la population de son territoire, dans le but de mieux répondre à leurs attentes et leurs besoins.

Cela passe par exemple par une meilleure fluidité dans les prises en charge entre médecins généralistes et spécialistes, par des facilités d’accès à un médecin traitant, ou encore par la capacité à mieux répondreaux soins non programmés, qui sont les missions socles des CPTS. Mais en réalité ce n’est que la formalisation de ce que nous, professionnels de santé, nous avons toujours fait !

Quelles solutions les CPTS apportent-elles aux professionnels de santé ?

Les CPTS étant des structures où les professionnels de santé sont amenés à se réunir régulièrement, elles facilitent, simplifient les échanges et le partage de pratiques. Elles permettent à plus forte raison de trouver ensemble des solutions aux problématiques rencontrées, de se soutenir et de se répartir le travail.

J’ajouterai que ces structures permettent la mise en commun des compétences, et in fine leur démultiplication. C’est un point capital pour la bonne prise en charge des personnes, surtout quand nous sommes face à des patients en situation plus ou moins complexes, qui nécessitent parfois l’intervention de plusieurs spécialistes.

Autre point important, les structures CPTS permettent d’apporter un renfort précieux aux hôpitaux et aux urgences, qui reçoivent de nombreuses consultations censées être prises en charge par la médecine de ville.

Pourquoi les CPTS sont-elles incontournables à l’exercice professionnel de demain ?

La démographie médicale en berne et l’augmentation constante des Burn Outs chez les soignants rendent urgentes l’optimisation du temps et des conditions de travail des professionnels de santé.

Des outils comme la télémédecine, le dossier médical partagé ou encore la messagerie sécurisée par exemple, permettent justement de faire gagner du temps, et à terme d’améliorer leurs conditions d’exercice.

Mais encore faut-il pouvoir s’y intéresser après une journée épuisante ! C’est là que se situe la plus-value des CPTS : elles mutualisent les moyens. Une équipe de professionnels de santé réfléchira à des solutions, testera, et choisira la plus adaptée pour l’ensemble de la communauté.

Il faut aussi avoir conscience que les CPTS sont une réponse pour demain. Si nous ne mettons pas en place aujourd’hui des structures qui facilitent notre travail et nous font gagner du temps, à l’avenir nous serons complètement débordés car submergés par des tâches administratives ou des demandes de rendez-vous que nous ne pourrons pas satisfaire.

C’est également pour ces raisons que les CPTS doivent rester à l’initiative des professionnels de santé. Parce que ce sont les libéraux qui vont déterminer la façon de travailler à l’extérieur, c’est un engagement de leur part. Si ce n’est pas eux qui en sont à l’origine, malheureusement, d’autres le feront à leur place, ce qui ne facilitera pas leur exercice, bien au contraire.

« Les CPTS sont un investissement sur le temps, aux libéraux de s’y engager, à nous, URPS de les accompagner pour la suite du projet. »

Quels sont vos objectifs de déploiement d’ici 2022 ?

L’objectif est d’avoir au moins 80 CPTS, réparties sur tout le territoire de la Région PACA, d’ici 2022.Aujourd’hui, 1 projet est en passe de signer l’ACI, 30 projets sont en cours de structuration, et 20 émergents ont été identifiés.

Au-delà du déploiement des structures dans la région, mon objectif est également qu’elles soient soutenues de façon pérenne par l’ARS et l’Assurance Maladie. Le parcours de structuration est long avant la signature des ACI. Mais la formalisation et la réalisation d’une meilleure prise en charge des patients est déjà un formidable objectif.

Comment les CPTS ont aidé à la gestion de la crise sanitaire ?

Les CPTS ont été d’un grand secours face à la crise sanitaire, parce qu’elles ont été réactives. Elles ont eu la capacité de transmettre les informations de manière ascendante et descendante. Au moment de la réception des masques par exemple, elles ont identifié les structures qui avaient le besoin le plus urgent pour leur distribuer en priorité.

Grâce aux CPTS, nous avons pu également recruter des IDE pour aller dans des EHPAD qui étaient en manque de personnel, monter des centres Covid… Et elles auraient pu faire encore mieux si leurs suggestions avaient été écoutées et mises en place.

Les CPTS ont prouvé leur agilité et leur réactivité, tout simplement parce que les professionnels de santé de ces structures ont pris l’habitude de travailler ensemble, ils se connaissent, ils ont des moyens d’information et de communication et s’organisent donc beaucoup plus facilement.

Les médecins libéraux doivent voir ces structures comme l’opportunité d’améliorer leurs conditions d’exercice. Ce n’est pas une obligation de plus, et nous devons garder la main sur celles-ci.

Ce n’est pas parce qu’on aboutit potentiellement à la signature d’un Accord Cadre Interprofessionnel (ACI)qu’on se plie à l’Assurance Maladie ou à l’ARS. La signature signifie qu’on commence une démarche pour faire avancer la prise en charge des patients.

Pour preuve, concernant les Maisons de Santé Pluri-profesionnelles par exemple, à ce jour, seulement 30% d’entre elles ont signé les ACI. Néanmoins, les professionnels de santé engagés dans ses structures d’exercice coordonnés sont ravis d’y travailler !

On a tout à gagner à modifier notre façon de fonctionner. C’est probablement ce qui est très attractif pour les jeunes médecins, parce qu’ils y retrouvent le fonctionnement qu’ils ont connu à l’hôpital, où chacun peut se parler. L’évolution des moyens de communication et les réseaux sociaux démontrent ce besoin de partage d’information de manière simple et rapide.

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