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Les CPTS ont joué un rôle essentiel pendant la crise.

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Le Dr Gérard Eddi, médecin généraliste à Martigues, a un parcours marqué par l’engagement qu’il soit associatif ou syndical. Conscient des limites de l’exercice isolé de la médecine libérale, il revendique la qualité de la prise en charge du patient dans l’exercice coordonné.

Même si sa vision de l’exercice libéral de demain est collective, Gérard enrage : « la problématique, c’est qu’on est face à un système de santé où les libéraux ne peuvent pas bien se porter s’ils sont seuls et non coordonnés, ce n’est juste pas possible. » Alors, quand il entend parler de CPTS en 2016, la notion reste encore trop vague et théorique pour susciter son intérêt. Une fois le concept de la CPTS précisé et les dispositifs économiques intégrés, il décide, avec d’autres professionnels de santé de son territoire, de se lancer.

En mars 2019, le projet est enfin amorcé, mais l’équipe se trouve confrontée à une première difficulté de convaincre d’autres consœurs et confrères de s’impliquer dans cette aventure. Et Gérard de rappeler que la constitution d’une CPTS est « un processus qui n’est pas naturel pour des professionnels de santé. Ils passent du statut de solitaire à celui d’équipe, c’est un changement total de paradigme. »

Malgré ces craintes chez les médecins, l’équipe de Gérard parvient rapidement à constituer une structure autour d’une vingtaine de professionnels de santé, dont des pharmaciens et des infirmiers, et à recevoir le soutien de la mairie de Martigues qui a compris avec promptitude l’utilité d’une CPTS sur son territoire.

Aujourd’hui, la CPTS du Pays de Martigues a obtenu la validation du Commission de Coordination de l’Offre de Proximité (CCOPD) pour être financée et passer à la labellisation. Son territoire s’étend sur 4 communes : Martigues, Châteauneuf-les-Martigues, Saint Mitre-les-Remparts et Port-de-Bouc pour accompagner 87 000 habitants et créer une structure de taille 2 (Les structures allant de 1 à 4 ; 4 étant la plus grande), avec environ 200 professionnels de santé. Mais comme le précise Gérard : « je fais partie des gens qui sont convaincus que les CPTS vont évoluer. C’est une ébauche, mais nous comptons fédérer d’autres professionnels de santé, et les besoins de la population peuvent évoluer. »

Il reconnaît surtout l’importance de la CPTS à l’arrivée de l’épidémie, où la communauté a construit, en moins de 4 jours, un centre de Consultations Covid. « Cela n’aurait jamais été possible sans la communauté. Nous travaillons depuis 2019 ensemble, nous étions donc déjà bien formés et les contacts étaient déjà existants. Il y avait déjà un degré de maturité qui nous a fait gagner énormément de temps », explique Gérard.

Outre la logistique pour la prise en charge du patient, Gérard voit aussi un changement important d’un point de vue technique. « Globule », application pour les professionnels de santé proposant un suivi instantané de leurs patients dans leurs soins, avait été déployée avant la crise sanitaire et a indéniablement prouvé son intérêt et son efficacité : « Concrètement les gens ont compris que travailler ensemble avait du sens, et que pour cela il fallait aussi avoir des outils. Aujourd’hui les personnes qui travaillent autour des patients forment une équipe sont transversales grâce à ce type d’outils numériques ». Depuis l’épidémie, l’application est présente sur les portables des 200 professionnels de santé de la CPTS.

Même si à l’apparition du Covid, les choses étaient confuses et inattendues, grâce au travail coordonné, au partage de savoirs, aux outils numériques, et aux partenaires comme les mairies ou les hôpitaux, la CPTS du Pays de Martigues y a fait face de manière intelligente. Durant un mois, 250 patients ont été pris en charge par 40 infirmiers et 30 médecins mobilisés sur le territoire : « grâce à la coordination et à l’application, aucun patient ne nous a échappé ! ».

Au-delà de la prise en charge, ce travail collectif les aide à tirer des leçons et trouver des solutions aux problèmes auxquels ils ont été confrontés. Gérard et son équipe se sentent désormais en capacité de faire face instantanément à l’apparition d’une nouvelle situation exceptionnelle.

Autre bénéfice de l’exercice coordonné, selon le Dr Giral, il permet de compenser la décroissance démographique des médecins grâce à l’augmentation de l’efficience des professionnels sur place, de garder une veille sur la qualité des soins, d’avoir une légitimité du rôle des CPTS vis-à-vis des acteurs du territoire et enfin de créer de la continuité entre la ville et l’hôpital.

Ainsi, Gérard raconte : « Il y a même une discussion pour faire entrer l’hôpital dans la communauté de notre application de coordination ! C’est un nouveau paradigme qui nous permet de nous coordonner de manière concrète. Le médecin de ville pourra savoir où en est son patient dans sa prise en charge à l’hôpital, et s’il repasse en médecine ou non. Les médecins seront plus avertis quant à leur posture, le pharmacien saura exactement quel médicament a été prescrit au patient, les infos seront instantanément transmises. »

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